Lorsque nous parlons d’encens en parfumerie, notre imagination nous emmène souvent dans un temple ou une église sacrée, ou dans un marché oriental aux odeurs puissantes et enveloppantes. Utilisé comme ingrédient pour les parfums corporels, comme rituel parfumé pour parfumer votre maison, l’encens est plein de mystères et de symboles… Pour comprendre l’origine de l’encens et ses secrets, nous devons commencer un voyage millénaire. Retournons aux racines de ce parfum des dieux, devenu un geste parfumé qui a traversé les âges et les frontières.
1) Matière Première ou Parfum de Maison ?
Les deux en fait ! A l’origine, l’encens est une matière première utilisée en parfumerie. Le véritable encens provient de la résine des arbres que l’on trouve dans certaines régions d’Afrique, du Moyen-Orient ou de l’Inde. Depuis l’aube des temps, les gens brûlent cette résine pour profiter de son parfum chaud et ambré. Du mot latin incendere (brûler), l’encens définit aussi plus généralement tous les bois, les gommes et les plantes qui dégagent une odeur en se consumant. C’est pourquoi on dit couramment aujourd’hui qu’il faut brûler de l’encens. Cet encens peut alors prendre différentes formes et se parer de multiples parfums.
2) Un Parfum d’Orient
Commençons notre voyage à Oman, dans la péninsule arabique. Dans la ville de Salalah, il est facile de se perdre dans les allées étroites et éclatées de l’ancien souk d’Al-Husn. Regardez où vous marchez pour ne pas trébucher sur les sacs remplis de pierres d’encens qui se répandent sur le sol et dans les échoppes. Levez les yeux et admirez la grande palette de couleurs qui s’offre à vous : des gommes rouges, blanches, ambrées ou vert bleuté s’empilent de tous côtés. Maintenant, c’est au tour de vos narines d’être titillées. La fumée qui émane des brûleurs en argile ou en cuivre crée une odeur balsamique, résineuse et terpénique.
Bienvenue au paradis du commerce de l’encens ! Vous y trouverez différentes
variétés de résines dont les prix
changent complètement en fonction de leur origine et de leur qualité. A
proximité, les essences sont extraites pour en faire des préparations
parfumées. L’huile essentielle qui provient de la résine d’encens à l’origine,
permet de créer des mélanges parfumés envoûtants. On ajoute du bois de oud, du
santal ou d’autres plantes pour parfumer la peau et la maison. Vos sens en
émoi, vous quittez le souk. Mais ce parfum vous accompagnera partout. Vous
pouvez le sentir sur vos vêtements et sur vos cheveux pour mieux vous
envelopper de sa chaleur.
Les notes chaudes et ambrées de l’encens sont au cœur de notre mystérieuse et
envoûtante eau de parfum 555. Un parfum tendre et viril qui vous emmènera dans
des paysages parfumés lointains…
3) L’Art de la Récolte : Une Méthode Ancestrale
Ne soyez pas
surpris de sentir ce parfum dans toute la région du Dhofar, dans les hammams ou
à l’entrée des maisons pour accueillir les visiteurs. Depuis des milliers
d’années, le sud d’Oman est l’un des berceaux de l’encens. A quelques
kilomètres des rives de la mer d’Oman et de la frontière du Yémen, des arbres
sacrés poussent partout. A première vue, ils pourraient nous faire penser à des
oliviers… Mais c’est le boswellia sacra,
l’arbre à encens.
Le tronc blanchâtre de l’arbre cache une véritable mine d’or. Pour l’obtenir,
il faut faire une incision dans l’écorce. Le liquide qui s’écoule lentement se
transforme en « larmes » sous l’influence de l’air, de la chaleur et du
soleil. La sève est ensuite recueillie et laissée au repos pendant quelques
jours. Cette opération est répétée trois fois par an. L’arbre est alors
« au repos » pendant les 3 années suivantes. Ce savoir-faire connu
depuis des millénaires se transmet de génération en génération. Les meilleurs
arbres peuvent fournir entre 3 et 10 kilos de résine d’encens selon la culture.
4) La Route de l’Encens
Utilisé depuis plus de 6 millénaires dans toutes les civilisations, l’encens a longtemps été transporté par caravane depuis les terres de la reine de Saba. Celle-ci avait d’ailleurs offert une grande quantité de précieux encens au roi Salomon. À l’origine, la route de l’encens reliait les zones de production, dont le sultanat d’Oman fait encore partie, à divers endroits où la résine était consommée : en Égypte, à Jérusalem et parmi les civilisations méditerranéennes. Ce chemin était en fait un réseau de routes commerciales couvrant plus de 2000 kilomètres pour faciliter le passage des caravanes transportant de l’encens et de la myrrhe. Ce commerce a prospéré pendant plus d’un siècle et a ouvert la voie à de nombreux autres échanges. Nous ramenions d’Inde toutes sortes d’épices parfumées, de l’ébène et de la soie. Et d’Afrique de l’Est, le commerce se faisait aussi avec de l’or, des bois rares et des plumes d’animaux.
Florissant,
le commerce de l’encens laisse encore des traces aujourd’hui. Il y a seulement
vingt ans, les vestiges de la ville d’Ubar, au nord de Salalah, ont été
découverts. Aux portes du désert, le site archéologique montre encore la
richesse de ses habitants et l’ingéniosité des systèmes d’irrigation de
l’époque. Surnommée l’Atlantide des Sables par Lawrence d’Arabie, la ville
commerciale a probablement dû voir partir de nombreuses caravanes d’encens à
travers les dunes.
Mais cette route n’était pas réparée. Pour éviter de payer de lourds impôts,
les chemins ont souvent changé. Les Romains utilisaient la route maritime. Ils
passaient par la mer Rouge pour ne pas donner aux Bédouins de l’or et de
l’argent pour les épices ou l’encens.
L’origine de l’encens vient du sud de la péninsule arabique, en particulier où
l’on trouve l’arbre à encens, le boswellia sacra
À gauche, le « matériau final », la résine d’encens qui a été
recueillie en pratiquant une incision dans l’écorce de boswellia au centre, qui
s’est écoulée pour former des « larmes » à droite.
4) Brûler de l’Encens, un Ancien Rituel
Comme nous l’avons vu plus haut, l’origine de l’encens fait également référence à la pratique consistant à brûler ou à chauffer un matériau dans un support-encens qui dégage une odeur agréable. Cet acte de fumigation est certainement la première forme de parfum que l’homme ait connue. En effet, depuis toujours, sur tous les continents, les peuples procédaient à des fumigations pour communiquer avec leurs dieux, se soigner, améliorer leur bien-être et élever leur niveau de conscience.
5) Formes et Parfums, Autant de Diversités que de Cultures
Il y a autant
de formes et de parfums à brûler qu’il y a de pays et de cultures. En effet, la
préparation de l’encens peut varier d’un pays à l’autre et avoir des fonctions
et des vertus différentes selon les croyances. Il existe deux grandes
catégories de formes : celles qui sont façonnées par l’homme et la seconde qui
reste à l’état brut. Parmi elles, on brûle des résines comme l’oliban, notre véritable encens, qui va produire une
huile de vapeur parfumée. Nous pensons aussi aux éclats de bois ou à certaines
épices. Ces parfums à brûler sont simplement réduits en poudre et parfois
additionnés d’huiles essentielles. Ce sont les formes les plus simples et les
plus anciennes utilisées pour la fumigation, qui se fait généralement à l’aide
d’un charbon brûlant.
De l’autre côté, il existe des versions plus récentes d’encens avec tige ou
cônes. Il existe même des boules d’encens, fabriquées à partir du produit
parfumé mélangé avec du miel, de la mélasse ou du confit de fruits. Au Japon,
l’encens est utilisé pour développer l’art de l’odorat dans le Kôdô et on
« écoute » l’encens selon la saison. Il a un aspect esthétique bien
sûr, mais il s’associe aussi à la spiritualité en accord avec l’esprit du Zen.
Contrairement à l’encens indien, il émet peu de fumée. Pour les moines
tibétains, l’encens fait partie intégrante de la pratique de la méditation. Au
Népal, l’encens est enfermé dans une pâte de riz qui a la forme d’un cordon
pour en enflammer les extrémités.